lundi 12 janvier 2009

JEAN RICHEPIN





Jean Richepin est un poète et un auteur dramatique français, excentrique, il est proche de Maurice Rollinat et Raoul Ponchon.
Il fonde avec l'aide de ce dernier et de Maurice Bouchor, le groupe des Vivants,"pour lutter contre les conventions formelles et thématiques et rapprocher ainsi l'art de la vie".

Fortement inspiré par les œuvres de Petrus Borel, Baudelaire et Jules Vallès, qu'il considérait comme le réfractaire par excellence, il se décide à rejeter le joug des conventions sociales et culturelles, à célébrer l'instinct. Vantant, non sans humour, sa force physique, sa virilité, sa prétendue hérédité bohémienne, il se crée une biographie imaginaire et riche en couleurs

En 1876, le grand public découvre soudain Richepin avec La Chanson des gueux, qui vaut immédiatement à son auteur un procès pour outrage aux bonnes mœurs. Il fit scandale à sa sortie car Jean Richepin, tel un Villon moderne, y dépeignait un peuple semblant tout droit sorti de la Cour des Miracles. La Chanson des gueux coûta à Richepin 500 francs d’amende et un mois de prison à Sainte-Pélagie, mais il était d'ores et déjà trop tard, il était célèbre.

L'apparition du naturalisme lui fait découvrir, après sa libération, de nouveaux horizons, mais si, dans ses Caresses, il emploie un langage cru, argotique, populaire, l'étalage de sensualité affectée, souvent grotesque ou vulgaire, laisse trop facilement transparaître son désir de scandaliser la bourgeoisie, ce qui vaut au recueil d'être considéré comme manquant de sincérité poétique. Le matérialisme grandiloquent et le nihilisme fanfaron des Blasphèmes lui valent le surnom de « Lucrèce de foire ».

Jean Richepin
Les Caresses - Thermidor
Abdication

Vous êtes le Seigneur, vous êtes la Madone.
Rien ne me semble mal si votre voix l’ordonne.

Les douze stations de ce corps sans défaut
Son mon chemin de croix jusques à l’échafaud.

Avec une de vos câlines attitudes
Vous obtiendrez de moi toutes les platitudes.

Je commettrai, s’il faut ces fleurs à vos autels,
Sept fois dans un moment les sept péchés mortels.

Si vous désirez voir le soleil de l’orgie,
Je le ferai flamber sur ma gorge rougie.

Si vous voulez d’un grand héros porter le deuil,
Je mourrai sceptre en main pour flatter votre orgueil.

Si vous ne demandez que baisers et caresses,
Je vous endormirai dans un lit de paresses.

Si votre chair s’allume au désir libertin,
Je saurai dépasser Pétrone et l’Arétin.

S’il vous faut des bijoux, de l’or, de la pécune,
Je volerai pour vous le soleil et la lune.

S’il vous plaît que par moi l’Art dieu soit abjuré,
Aux métiers les plus vils je le prostituerai.

Si le bonheur d’une autre excite votre envie,
J’aurai le mauvais œil pour lui gâter la vie.

Si mon cœur vous distrait et vous sert de joujou,
Vous pourrez le casser comme un objet d’un sou.

Si d’un coffre-fort plein vos yeux sont en gésine,
J’apprendrai sans dégoût l’usure et la lésine.

S’il vous faut un bouquet de crimes pour vos seins,
Je prendrai le couteau rouge des assassins.

Si mon meilleur mai vous fait dire : peut-être !
Pour le perdre à jamais je serai lâche et traître.

Si de mon sang versé vous voulez boire un coup,
Soyez la guillotine et coupez-moi le cou.



«Si j'étais immortel, j'inventerais la mort pour avoir du plaisir à vivre.» Jean Richepin